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Écoutez cet article lu par Damien Van Achter

Ce qui ressort de cette enquête du Guardian, c'est la mise en lumière d'un phénomène systémique : le recrutement stratégique d'anciens responsables politiques britanniques par les géants technologiques américains.
De George Osborne chez BlackRock à Nick Clegg chez Meta, en passant par Tony Blair conseillant diverses firmes, on observe une véritable migration des élites politiques vers la Silicon Valley. L'événement Nvidia organisé par Jensen Huang illustre parfaitement cette asymétrie : face à des centaines d'investisseurs et de dirigeants tech, les représentants britanniques semblent en position de faiblesse structurelle.
Cette capture des talents politiques pose des questions fondamentales sur l'indépendance réglementaire et la capacité du Royaume-Uni à définir ses propres règles du jeu numérique. Le fait qu'une commission parlementaire surveille désormais ces 'revolving doors' révèle une prise de conscience institutionnelle, mais également l'ampleur du défi à relever.
Points de vigilance : Risque de diaboliser les reconversions légitimes ou de tomber dans l'anti-américanisme primaire plutôt que d'analyser les mécanismes systémiques de capture
8/10 : Score sur l'échelle des "5 piliers de la liberté", inspiré de l'ouvrage de Timothy Snyder

Et maintenant ?
Face à ces enjeux, plusieurs pistes d'action systémique se dessinent.
🤘 On pourrait imaginer une coalition européenne pour harmoniser les règles de cooling-off et créer un véritable statut européen de l'ex-responsable politique.
Plutôt que de subir des règles nationales disparates, l'UE pourrait définir des standards communs : période d'incompatibilité renforcée (3-5 ans), obligation de transparence sur les missions exercées, création d'une autorité européenne de surveillance des conflits d'intérêts.
Cette approche casserait le shopping réglementaire où les tech firms choisissent les juridictions les plus laxistes. Une alliance entre autorités de régulation, parlements nationaux et institutions européennes pourrait créer un rapport de force plus équilibré face aux stratégies d'influence de la Silicon Valley.
On saura que ça marche quand les recrutements d'ex-politiques par les GAFAM diminueront sensiblement et que les entreprises tech devront adapter leurs stratégies d'influence. À moyen terme, émergence d'un véritable contre-pouvoir institutionnel européen.
💪 L'enjeu dépasse la réglementation : il s'agit de créer des contre-narratifs à la rhétorique de la 'révolution industrielle' d'IA promue par Jensen Huang.
Une coalition média indépendants, think tanks européens et universités pourrait développer des récits alternatifs sur la souveraineté technologique.
Cela passerait par la valorisation de parcours d'ex-responsables politiques qui choisissent des secteurs d'intérêt général (santé, éducation, transition écologique) plutôt que Big Tech. Créer des 'role models' alternatifs et documenter les succès européens en matière d'innovation responsable.
On saura que ça marche quand le discours public privilégiera la souveraineté technologique à l'attraction parla Silicon Valley. À moyen terme, émergence d'un écosystème européen attractif pour les talents politiques et technologiques.
✊ Développer des structures européennes capables de concurrencer les packages salariaux de la Silicon Valley pour attirer les talents politiques vers l'intérêt général.
Cela pourrait passer par la création de fonds européens dédiés au financement de think tanks, d'ONG tech-citoyennes, ou de postes de 'senior advisors' dans les institutions européennes.
L'idée serait de créer des alternatives économiquement viables au passage vers le privé américain, tout en gardant ces compétences au service de l'Europe.
On saura que ça marche quand les reconversions vers des structures européennes d'intérêt général deviendront plus fréquentes que vers la Silicon Valley. À court terme, création de nouveaux postes attractifs dans l'écosystème institutionnel européen.
Ces pistes ne sont pas des recettes toutes faites, mais des points d'entrée pour repenser nos systèmes numériques selon une logique de liberté positive : non pas limiter, mais augmenter nos capacités collectives d'action.
Si tu connais des exemples réels qui vont dans ce sens — ou des contre-exemples qui méritent d'être documentés — partage-les moi et documentons les ensemble !
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