🇦🇺 L'Australie : premiers enseignements de l'interdiction des réseaux sociaux aux ados

Une semaine après l'interdiction des réseaux sociaux aux moins de 16 ans, l'Australie découvre l'inventivité des adolescents : VPN, fausses identités, migration vers des plateformes inconnues. Un laboratoire mondial révélateur.

22 déc. 2025
🇦🇺 L'Australie : premiers enseignements de l'interdiction des réseaux sociaux aux ados
Photo by Jamie Davies / Unsplash

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Quel premier bilan peut-on tirer de l’interdiction des réseaux sociaux aux mineurs australiens ?
L’Australie interdit, depuis une semaine, l’accès aux réseaux sociaux aux moins de 16 ans. Une loi présentée comme historique, observée de près par le reste du monde… mais déjà contournée par les adolescents.

Cette initiative australienne fait bouger les lignes d'un débat jusqu'ici théorique. Pour la première fois, un État tente de réguler frontalement les plateformes en leur transférant la responsabilité de la vérification d'âge, sous peine de lourdes sanctions financières.

Ce qui ressort après une semaine ? Un jeu du chat et de la souris déjà engagé. Les adolescents font preuve d'une créativité remarquable : maquillage pour tromper l'IA de reconnaissance faciale, utilisation de VPN pour contourner les restrictions géographiques, ou encore migration massive vers des plateformes moins connues comme Coverstar ou Rednote. L'ironie veut que la ministre des Communications ait défendu cette mesure... dans une vidéo TikTok, aussitôt commentée par des mineurs toujours connectés.

Dans les faits, on observe une dispersion plutôt qu'une disparition. Privés de TikTok et Instagram, les jeunes se tournent vers un écosystème de plateformes plus petites, souvent hors du radar parental. Cette fragmentation révèle une tension fondamentale : peut-on réellement protéger sans créer de nouveaux angles morts ? L'Australie devient malgré elle un laboratoire mondial, démontrant à quel point les réseaux sociaux forment une galaxie aux failles multiples plutôt qu'un bloc uniforme. 🎯

Points de vigilance : Risque de déplacement du problème vers des plateformes moins régulées plutôt que résolution. Illusion de protection par l'interdiction vs régulation effective. Transfert de surveillance vers des acteurs privés pour la vérification d'âge.

8/10 : Score sur l'échelle des "5 piliers de la liberté", inspiré de l'ouvrage de Timothy Snyder
Framework: Les 5 piliers de la Liberté
Certains articles publiés ici sont produits grâce à une grille d’analyse inspirée des 5 piliers de la Liberté, théorisés par l’historien Anthony Snyder dans son livre “De la Liberté” (2024). En croisant les piliers de Snyder et sa définition de la liberté positive/négative avec ceux de l’innovation dite “systémique”

Et maintenant ?

Face à ces enjeux, plusieurs pistes d'action systémique se dessinent.

🤘 Créer un consortium international de régulateurs pour harmoniser les standards de protection des mineurs sur toutes les plateformes, y compris les plus petites.

Plutôt que des interdictions nationales contournables, cette approche viserait à établir des normes communes de conception éthique : interfaces moins addictives, algorithmes transparents, outils de contrôle parental effectifs. Le consortium pourrait certifier les plateformes respectueuses et créer un 'label de confiance' reconnu mondialement. Cette démarche casserait le cercle vicieux de la migration vers des plateformes moins régulées en élevant le niveau général de protection.

On saura que ça marche quand les nouvelles plateformes intégreront ces standards dès leur conception, et quand les adolescents n'auront plus intérêt à fuir vers des alternatives moins sûres.

💪 Développer des outils de régulation parentale distribués et interopérables, contrôlés par les familles plutôt que par les plateformes.

Au lieu de déléguer la surveillance aux GAFAM, cette approche donnerait aux parents des outils techniques standardisés (comme OpenParental ou Family DNS) permettant de personnaliser l'accès numérique selon leurs valeurs. Ces outils pourraient fonctionner au niveau du routeur domestique ou du terminal, indépendamment des plateformes. Une coalition d'associations familiales, d'ONG et de développeurs éthiques pourrait porter cette alternative, redonnant la souveraineté éducative aux familles.

On saura que ça marche quand les parents choisiront massivement ces outils plutôt que de subir les politiques des plateformes, et quand cette approche sera adoptée par d'autres pays comme alternative à l'interdiction.

Transformer l'éducation aux médias en compétence citoyenne obligatoire, co-construite avec les jeunes eux-mêmes.

Plutôt que de protéger par l'interdiction, cette piste mise sur l'autonomisation. Des programmes scolaires pourraient enseigner la lecture critique des algorithmes, la détection des dark patterns, et les stratégies de déconnexion volontaire. L'innovation serait de co-construire ces programmes avec des adolescents, reconnaissant leur expertise d'usage. Des 'ambassadeurs numériques' lycéens pourraient former leurs pairs, créant un effet de démultiplication plus crédible que la parole adulte.

On saura que ça marche quand les jeunes développeront spontanément des pratiques numériques plus conscientes, et quand cette approche éducative sera réclamée par d'autres générations d'usagers.


Ces pistes ne sont pas des recettes toutes faites, mais des points d'entrée pour repenser nos systèmes numériques selon une logique de liberté positive : non pas limiter, mais augmenter nos capacités collectives d'action.

Si tu connais des exemples réels qui vont dans ce sens — ou des contre-exemples qui méritent d'être documentés — partage-les moi et documentons les ensemble !

Plus d'articles, par "pilier" de la Liberté, selon Snyder

Contact

Damien Van Achter (davanac)
Consultant en souveraineté numérique

Email: d@van.ac
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